Rencontre à Matignon : l’Association « Les 184 » poursuit son engagement pour améliorer les conditions de fin de vie

Le 2 avril 2025, une délégation de l’association citoyenne « Les 184 » a été reçue à l’Hôtel de Matignon par trois membres du Cabinet du Premier ministre, pour un échange d’une heure sur les enjeux liés à la fin de vie. Cette réunion intervenait deux ans jour pour jour après la clôture des travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie (CCFV)
Un calendrier législatif encore retardé
La délégation a rappelé :
- Les engagements, pris au nom de la République, concernant le dépôt d’un projet de loi et la mise en œuvre de la Stratégie décennale sur les soins palliatifs (“avant la fin de l’été 2023”) ;
- Le risque pour la démocratie participative si la CCFV, saluée par la plupart, n’était pas suivie d’effets ;
- Le travail déjà considérable accumulée par la démocratie représentative, à l’Assemblée nationale ou au niveau local, aidée aussi par les administrations et les experts concernés.
Le Cabinet a confirmé que les votes à l’Assemblée nationale sur les deux Propositions de Loi (PPL) désormais découpées – “soins palliatifs” (PPL Vidal), “aide à mourir” (PPL Falorni) – sont bien prévus ensemble le 27 mai. Mais, le Sénat ne devrait pas s’en saisir avant l’automne, sauf en cas de session extraordinaire qui ne serait pas envisagée à ce stade malgré les retards accumulés. La délégation a réitéré son souci que la discussion des deux PPL ne soient pas dissociées pour tenir compte de la complémentarité des deux approches pour 75% des votes de la CCFV.
Des questions sensibles
Parmi les points sensibles abordés figurent notamment :
- Pour la PPL Vidal, le statut et le rôle des maisons d’accompagnement en complément des soins palliatifs hospitaliers car les Unités de Soins Palliatifs (USP) ne suffiront pas ;
- Pour la PPL Falorni, en particulier, le délai d’éligibilité à l’aide à mourir (la notion de “moyen terme n’ayant pas été retenue par la CCFV) ou la place des directives anticipées et de la personne de confiance. Le Cabinet a fait état de la demande de clause de conscience par des pharmaciens. La délégation a insisté sur la nécessité d’un parcours clair, accessible et respectueux des volontés des patients.
La Stratégie décennale et la tarification à l’activité
La délégation a regretté l’insuffisante visibilité de la Stratégie décennale pourtant suivie au niveau international comme l’avait été la CCFV et a plaidé pour un plus grand rôle du Centre national des soins palliatifs. Le Cabinet a confirmé les financements prévus (100 millions € dès 2024, 200 millions € en 2025, etc.) et le déblocage récent de projets concrets, comme l’USP en Corrèze suivie par “Les 184”.
Autre sujet majeur abordé : les effets contre-productifs de la Tarification à l’Activité (T2A). Le témoignage d’une aide-soignante membre de la délégation (en appendice) a illustré que cette méthode de financement ne prend pas en compte le temps passé en soins d’accompagnement essentiels en fin de vie. Le Cabinet a reconnu les limites du système actuel et indiqué que des options étaient à l’étude.
La poursuite du dialogue et la participation citoyenne
Ont été évoquées en conclusion la poursuite du dialogue y compris avec le Premier ministre après les débats à l’Assemblée ainsi que la réédition de conventions citoyennes. Sans s’engager pour l’exécutif, la réponse a montré que ce n’était pas dans les priorités actuelles du Cabinet.
« La T2A a été mise en place en 2004 avec pour objectif de mieux financer les établissements de santé. On a rapidement constaté ensuite des fermetures de petits hôpitaux, des sorties anticipées de patients, une perte de temps en bureaucratie pour coder au détriment du temps passé auprès des patients. Le quota soignant/soigné a baissé puisqu’il est basé sur les soins techniques sans prendre en compte les soins d'accompagnement ni de confort.
La base de notre métier est l'écoute, l’observation et l'accompagnement de la personne dans les gestes de la vie quotidienne. Actuellement, seul le temps passé à faire une toilette, faire manger et les soins techniques sont pris en compte. Les accompagnements dans les déplacements, le temps passé au chevet d'un patient souffrant ou mourant, les massages de confort, le réconfort des familles… tous ces temps-là ne sont pas codés. Certes, dans les services de soins palliatifs, le quota soignant/soigné permet de travailler dans des conditions optimales ; mais, ce n'est pas le cas dans les autres services qui accueillent également des personnes en fin de vie, même ceux avec des lits identifiés en soins palliatifs.
Nous les soignants, nous sommes frustrés et fatigués d'être en sous-effectif, de devoir courir après le temps afin d'exercer notre métier dans de bonnes conditions. Nous sommes sous pression, stressés, inquiets par nos conditions qui s'aggravent. Et les établissements de santé, notamment des services comme la pédiatrie, la psychiatrie, la médecine générale sont dans un état critique. Un soignant pour dix soignés ne permet pas de donner aux patients la même qualité de soins. »